Entre le voyage symbolique et la quête identitaire
Par Nicolas Gary, le samedi 22 octobre 2011
« C’est tout une réflexion sur l’identité arménienne que nous avons voulu soulever en lançant ce projet. À l’heure de la mondialisation, que peut être l’identité de tout un peuple qui a vécu une diaspora ? » La manifestation Arménie, Arménies, à l’initiative du Centre national du livre, s’achèvera ce dimanche 23 octobre, avec plusieurs manifestations parisiennes.
Depuis le 16 octobre, les auteurs invités ont pu « retracer, symboliquement, le trajet de la migration arménienne, depuis Marseille, jusqu’à Paris », nous explique le Centre, au sortir de l’une de ces escales. Car c’est en train, dans un Orient express particulièrement agréable, que s’est revisitée l’histoire.
Les auteurs invités
Dans chacune des villes, des manifestations locales étaient prévues, avec des conférences, particulièrement suivies par les personnes d’origine arménienne, présentes sur place. « Ce fut l’occasion, à chaque fois, de poser les questions iodentitaires qui animent ces personnes. Non seulement sur le fait de l’arménité à ce jour, mais également la relation avec le passé, celui de la diaspora, ou encore de la structure du peuple arménien. »
Les collectivités ont par ailleurs très bien joué leur jeu, nous assure-t-on. Jeudi soir, pour démarrer les festivités parisiennes, un concert était d’ailleurs prévu à la Bellevilloise.
« C’est une occasion historique double : d’abord, parce que l’on célèbre les 20 ans de l’indépendance de l’Arménie. Ensuite, c’est une anticipation du Centre, puisque l’an prochain la ville d’Erevan a été désignée comme Capitale mondiale du livre par l’UNESCO », souligne le président du CNL, Jean-François Colosimo. Erevan est aujourd’hui la plus grande ville d’Arménie, et sa capitale depuis 1918.
Découvrir une littérature qui s’interroge
Alors cette manifestation, Arménie, Arménies, c’est également un hommage rendu par avance, et l’occasion de rappeler le rôle même du CNL. En effet, l’établissement aide les éditeurs français, par des bourses, à la traduction d’oeuvres étrangères en français. Et nombre de maisons ont pu profiter de ces subventions. L’autre pan, c’est celui de l’extraduction, qui consiste à faciliter la traduction en des langues étrangères d’oeuvres françaises, et donc à simplifier l’exportation du patrimoine littéraire.
Dans le cas de la littérature arménienne, c’est « la vocation du Centre à importer de nouvelles littératures qui est en jeu avec cette manifestation ». En jetant un éclairage sur ces auteurs peu connus, ou à découvrir, c’est « une place plus importante à la littérature de ‘petites nations’, comme disait Kundera, que le Centre souhaite accorder ».
Raconter le témoin
On pourra également évoquer la rencontre de Peter Balakian, Krikor Beledian et Marc Nichanian, au CNL. L’occasion pour les trois hommes d’évoquer leur travail, leur conception du témoignage, et la difficulté de témoigner, finalement, de cette diaspora.
Ainsi, Marc Nichanian, remarquait qu’ « en Arménien, on n’a jamais parlé de ‘témoignage’ pour évoquer les récits des rescapés ». Et de poursuivre : « La catastrophe, ce ne sont pas les morts, ni les gens que l’on tue. La véritable catastrophe, plus que la diaspora, c’est la mort du témoin. »
Balakian, pour sa part, évoquait plutôt le récit de cette histoire comme une fouille personnelle : la mémoire devient un lieu d’investigation, comme son livre se présente tel un patchwork de témoignages.
Avec un auteur qui revenait chez les trois autres, Hagop Ochagan, très présent dans l’écriture des uns et des autres, soit pour tenter de dépasser ses interrogations, ou pour en compléter l’oeuvre.